La lettre économique d’Egypte n°N° 98 – Juillet 2019

Certains reviennent de vacances, d’autres s’apprêtent à partir. C’est le temps des grandes migrations estivales. Mais la vie continue…

Ce mois-ci notre éditorial va se concentrer sur deux événements complémentaires : la décision du FMI sur la 5ème et dernière revue du programme, et la publication par l’institut statistique égyptien, le CAPMAS, des derniers chiffres sur la pauvreté en Egypte. Pourquoi faire un lien entre les deux ? Parce que les mesures de réduction des subventions au secteur de l’énergie (carburant et électricité) ont des conséquences sur la vie quotidienne des Egyptiens : augmentation du coût de production des biens manufacturés, augmentation des prix des transports. Parce que depuis trois ans, les variations du taux de change de la Livre égyptienne ont eu des conséquences importantes sur les prix des biens de consommation, qu’ils soient produits localement ou importés. Malgré toutes les mesures prises par les autorités égyptiennes pour atténuer les effets de ces augmentations de prix sur les populations les plus vulnérables, notamment en continuant de subventionner les prix de certains produits alimentaires de première nécessité et en mettant en place des programmes d’aide sociales en cash (les programmes Takaful et Karama par exemple), la part de la population pauvre continue d’augmenter. Ainsi, en 2015, année précédant le recours au FMI, 27,8% de la population était considérée comme pauvre ; pour l’année fiscale 2017/2018, ce taux est passé à 32,5%, soit une hausse de 4,7 points. Le seuil de pauvreté est situé par le CAPMAS en dessous de l’équivalent de 1,3 EUR par jour, soit un revenu annuel de 8 827 LE ou environ 480 EUR. A titre de comparaison, le salaire annuel moyen s’élève en Égypte à 59 000 LE, soit environ 3 200 EUR (chiffres fournis par le CAPMAS).

Faire un lien direct avec les effets du programme FMI serait toutefois trop réducteur : rappelons-nous que quand l’Égypte a fait appel au FMI et a lancé cette politique d’austérité, le pays était en quasi cessation de paiement. La catastrophe était imminente. Le rétablissement des grands équilibres macroéconomiques reste spectaculaire. C’est ce que le FMI a souligné dans le dernier rapport de la 5ème revue du programme que son conseil d’administration a approuvé le 26 juillet, permettant le déblocage de la dernière tranche de 1,8 milliard US$ du prêt de 12 milliards US$ approuvé début décembre 2016. Pour autant, comme nous avons déjà eu l’occasion de le rappeler dans de précédents numéros de notre LEE, le chemin à parcourir reste long et l’effort ne doit pas être relâché. Il faut d’abord consolider les résultats macroéconomiques : la dette publique reste élevée, tout comme le déficit public, même si le pays a pu dégager un excédent primaire (hors service de la dette donc) de 2%. Mais au-delà des résultats macroéconomiques et du taux de croissance prometteur (5,5%), il faut maintenant que ces réformes profitent à la population, qu’elle en sente les effets positifs. Et pour cela la croissance du PIB doit être une croissance inclusive. Pour cela, l’économie réelle doit redémarrer : la croissance ne doit pas rester portée par le seul secteur des hydrocarbures mais désormais de manière significative impacter positivement l’économie réelle, tout comme les investissements qui restent trop concentrés sur ce même secteur. Le FMI ne s’y trompe pas qui identifie les prochains défis que l’Egypte doit relever : libérer le secteur privé, producteur de richesse et d’emplois, faire en sorte que les règles de concurrence soient transparentes, que secteur public et secteur privé obéissent aux mêmes règles, sans distorsion de concurrence… C’est à ce prix que la pauvreté diminuera dans le pays.

Bonnes vacances à ceux qui doivent encore partir, et bonne reprise aux autres !

Jérôme Baconin

AU SOMMAIRE
1. Nouvelle année fiscale, nouvelle vague d’augmentation des prix administrés
2. Les relations économiques et commerciales Egypte-Turquie
3. Cadre juridique national du droit de la propriété intellectuelle en Egypte
4. Brèves et indicateurs économiques

La lettre économique d’Egypte n°N° 98 – Juillet 2019 :

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Dernière modification : 05/08/2019

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