La lettre économique d’Egypte n°95 - avril 2019
L’éditorial de Jérôme Baconin, conseiller économique de l’ambassade de France en Égypte :
Chers lecteurs,
Au moment où sort cette lettre mensuelle, nous venons de célébrer la Pâques copte et nous sommes à la veille de l’entrée dans le mois sacré du ramadan : je tiens donc à souhaiter à nos amis chrétiens de très bonnes fêtes de Pâques, et à nos amis musulmans « Ramadan Kareem ».
Mais dans ce climat festif, l’économie reste présente, avec une attention particulière qui sera portée sur les chiffres de l’inflation ces prochains mois, dans un contexte qui risque d’être peu favorable à une baisse entre les traditionnelles augmentation des prix alimentaires durant le ramadan et les augmentations attendues des carburants et de l’électricité qui devraient se produire si l’Égypte tient le calendrier agréé avec le FMI. L’inflation en mars est ressortie à 14,2%, en légère baisse par rapport à février, mais à un taux encore supérieur à ce qu’elle était fin 2018. La volatilité des prix des produits alimentaires frais continue d’être le principal vecteur d’inflation. Cette situation a conduit le comité monétaire de la banque centrale à maintenir inchangé les taux directeurs en mars, alors que le mois précédent il avait décidé une baisse de 100pb. Le desserrement de la politique monétaire se fait encore attendre. Cela se ressent sur l’économie réelle qui reste toujours à la peine, avec un indice PMI qui ne parvient toujours pas à passer la barre fatidique des 50. La croissance soutenue du PIB à 5,5% est l’arbre qui cache la forêt : cette croissance est encore largement portée par le secteur oil&gas. Or les investissements dans ce secteur commencent à se tarir comme en témoigne les derniers chiffres d’IDE qui fléchissent sensiblement (au premier semestre 2018-19 les IDE se sont élevés à 2,8 Milliards $ contre 3,76 Milliards $ pour la même période de l’année précédente), prouvant que l’Égypte peine à attirer des investissements étrangers significatifs. Un comité interministériel a été mis en place pour analyser les causes de ce déclin et mettre en place une stratégie de relance. Cette situation amène à se demander si l’Égypte n’a pas perdu le gain de compétitivité qu’elle avait gagné fin 2016 lorsqu’a été décidé le flottement de la devise nationale qui a provoqué sa dépréciation de près de 60%, lui apportant un gain de compétitivité en matière de coût main d’œuvre considérable. Ce gain n’a-t-il pas été consommé dans les hausses successives de salaires qui ont suivi peu ou prou l’inflation (il sera intéressant à cet égard de voir l’effet sur le secteur privé de la récente hausse des salaires décidées dans la fonction publique). Sans doute convient-il aussi de se poser la question du climat des affaires, de la place du secteur public dans l’économie, et de la productivité.
Il n’en demeure pas moins que l’Égypte continue de bénéficier de la confiance des marchés : les agences de notation ont récemment relevé sa note, les dernières émissions d’Eurobonds, tant en dollar qu’en euro ont été de véritables succès. Le projet de budget pour 2019-20 vient d’être publié : il conviendra de l’analyser plus en détail, mais d’ores et déjà le ministère des finances y manifeste clairement la volonté de continuer l’effort d’ajustement.
Bonne lecture,
Jérôme Baconin
Chef du Service Economique
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